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Avant - Propos

« La régression chez l’enfant, un mécanisme de défense du Moi… »

 

Avant - Propos

 

 

L’éducateur spécialisé qui accompagne quotidiennement des personnes en grandes difficultés est continuellement placé au centre de questions complexes et souvent contradictoires.

 

Sa pratique éducative s’inscrit dans la prise en compte profonde et authentique de la personne accompagnée, ainsi que dans la relation particulière qu’il engage avec elle, appelant une démarche continuelle de médiation s’appuyant sur les notions d’empathie et de compréhension...

 

L’espace de cette relation singulière fait appel à des savoirs, des disciplines, des concepts différents que l’éducateur spécialisé doit pouvoir progressivement comprendre, adapter et utiliser dans le but essentiel d’aider au mieux la personne dans les situations et contextes de sa vie.

 

Ainsi, il s’agit de la sociologie, de l’ethnologie, voire de l’apport anthropologique pour une approche compréhensive de la question sociale, des différents courants de la psychologie, la clinique et la psychanalyse pour aborder la question des développements affectifs, des processus psychiques des sujets (y compris celle de l’éducateur lui-même...), mais aussi des enjeux inconscients dans la relation éducative...

L’éducateur est aussi amené à aborder des connaissances dans les domaines de la pédagogie pour ce qui englobe les processus d’apprentissage, de la psychiatrie dans le champ du handicap, de l’inadaptation, des maladies mentales, et plus largement de la philosophie dans une démarche de réflexion sur les valeurs, la pensée, l’humain... (sans oublier les apport incontournables et référentiels en droit, économie...).

 

Pour tenir sa place, l’éducateur ne peut fonctionner sous l’emprise d’un seul discours des disciplines dont s’inspire l’éducation spécialisée car, en effet, aucune théorie satisfaisante ne permet d’unifier la pratique de celle-ci.

Mais aussi, l’éducateur doit être conscient qu’il ne peut pas non plus mélanger ou juxtaposer simplement ces discours, isolant souvent chacun, un aspect d’une réalité plus large et complexe pour aboutir à ce que Joseph ROUZEL appelle «un mixte, une bouillie conceptuelle».

 

Ainsi, l’éducateur spécialisé, «travailleur de l’immatériel et du symbolique»[1], inscrit dans une équipe pluridisciplinaire sera amené à choisir, à adapter ses connaissances, ses représentations, à une approche multiréférentielle la mieux adaptée à l’hétérogénéité de la personne et des contextes.

 

Néanmoins, l’éducateur spécialisé doit être amené à “s’imprégner” des différents concepts théoriques pluridisciplinaires afin d’appréhender plus justement sa position et sa compréhension des situations.

 

“Le savoir s’y prendre” [2]s’acquiert en partant du terrain pour y revenir après un détour réflexif alimenté par les apports théoriques des sciences humaines, mais aussi en partant de la théorie pour y revenir après un détour par la médiation pratique.

 

 

 

 

Après avoir posé un cadre de compréhension des risques de “mélange rapide” d’une utilisation tout azimut des différents concepts théoriques de tout bord et de tout courant, avec un autre risque qui serait celui d’une “tout-justification” adaptative et réductrice de toutes les compréhensions et les actions menées, je me lance tout de même dans une démarche de recherche et de compréhension ciblée d’un concept spécifique de la psychanalyse qui est “les mécanismes de défense”, en m’appuyant sur la citation suivante : "Si l'éducateur formé à l'analyse par expérience vécue est amené dans certains cas limites ou complexes à recourir à l'analyse pour étayer son travail, il faut lui reconnaître sans détour le droit de s'en servir : l'en empêcher relèverait de questions mesquines."[3]

 

 

 

 

 

Introduction

 

 

Le développement du discours technique chez les travailleurs sociaux est contemporain de l’essor des sciences humaines[4] et plus particulièrement de la psychologie et de la psychanalyse.

 

L’histoire du travail social voit au milieu du XXème siècle l’arrivée de nouveaux courants de la psychologie (entre autres !), à commencer par les théories psychanalytiques.

Ainsi un certain nombre de concepts de base de la psychanalyse vont s’installer dans le discours des travailleurs sociaux.

Au premier rang de ces concepts, celui-ci de l’inconscient qui va ouvrir la voie aux autres.

 

Les éducateurs spécialisés s’approprieront, ou plutôt emprunteront, certaines des théories psychologiques et psychanalytiques, “ne disposant pas d’un corps théoriques spécifiques concernant leurs interventions dans les relations humaines[5].

 

Ils seront amenés à utiliser ces théories spécifiques et pourtant rigoureuses, pour participer avec leurs propres pensées à des réunions pluridisciplinaires en présence de thérapeutes, pour tenter de mieux comprendre, à leurs niveaux, l’Autre dans ses besoins, dans ses difficultés, dans ses possibilités, mais aussi certainement, pour analyser leur propre travail, tout en essayant de ne pas dériver vers une perte d’identité professionnelle...

 

 

 

Je suis éducateur dans un ITEP depuis 1997.

 

Cet établissement accueille des enfants entre 6 et 13 ans, filles et garçons, d’intelligence normale, présentant des troubles du comportement, de la conduite et de la personnalité (agressivité, violence, angoisses, anxiétés, mensonges, mutisme, passages à l’acte, grandes difficultés d’adaptation, d’attention, de concentration, diagnostiques d’hyperactivité...), en échec scolaire grave (souvent plus de 3 années de retard, accompagnées, pour certains, de phobies scolaires...) qui sont orientés par la Commission Départementale de l’Éducation Spécialisée.

 

Les éducateurs de cet établissement ne dérogent à une règle culturelle, de transmission des connaissances et des savoirs, de formation (...), de communications et d’expériences, et sont amenés continuellement à utiliser un vocabulaire théorique et pointu pour évoquer leurs pratiques, leurs vécus, leurs réflexions...

 

Ont-ils toujours la juste “maîtrise” de ces concepts utilisés ?

Ne peuvent-ils pas, au pire, en faire mauvais usage ?

Ne jouent-ils pas à l’apprenti “psy-sorcier” ?

 

Mais, en même temps, ont-ils d’autres moyens d’expression ?

 

L’important est alors de s’approcher au plus près de la justesse des propos, des réflexions et

du concept, dans le but d’aider le mieux possible la personne accompagnée.

 

Aussi, c’est dans une position d’humilité, une place d’éducateur et une prise de risque théorique que me permet ce travail spécifique que j’entreprends cette démarche d’exposé.

 

Cette étude s’inscrit clairement et spécifiquement (au strict opposé de la pratique éducative quotidienne et habituelle) dans un cheminement partant de connaissances théoriques (liées aux besoins de l’éducateur) pour étayer une pratique éducative en questionnement...

 

Le choix du concept théorique tirée de la psychanalyse que j’ai choisi de traité est motivé par mon observation au quotidien de beaucoup des enfants que j’accompagne, et dont leurs symptômes, leurs troubles, leurs conduites sembleraient parfois témoigner d’une régression du Moi en formation, la régression (ou autrement la fixation) étant définie comme un des mécanismes de défense inconscients...

 

Au delà de ce premier constat, ma question se porte alors sur les bénéfices pour le Moi, des processus de “Mécanismes de défenses” et plus particulièrement de la “régression”, mais aussi, a contrario, ses effets négatifs (pathologiques ?) sur le développement de l’enfant.

 

 

Mon travail se déclinera en 4 parties principales :

 

            * une base théorique de départ

            * une présentation du concept de “Mécanismes de défense” du sujet

            * une définition de la “régression” (et de la fixation)

           

            * Après cet exposé théorique permettant une approche repérée et référentielle, je me proposerais de présenter 3 cas d’enfants issus de mon expérience professionnelle actuelle qui pourraient “imager” ma présentation et proposer des pistes de réflexion à mon questionnement.

 

 

 

 

 

Base théorique de départ

 

Pour comprendre la notion de “Mécanismes de défense” du Moi, il faut tout d’abord exposer succinctement les concepts psychanalytiques de base issus de l’œuvre de Sigmund FREUD.

 

La théorie freudienne s’appuie sur l’étude du développement de l’appareil psychique qui s’articule autour de 3 théories principales

 

1°) les topiques (lieux et systèmes auxquels appartient tel ou tel acte psychique), représentations théoriques des diverses parties de l’appareil psychique.

 

Dans sa première topique (1905), FREUD distingue 3 systèmes : le conscient, le préconscient et l’inconscient.

Le conscient est l’ensemble des faits psychiques dont on a conscience.

Le préconscient, qui se situerait entre le conscient et l’inconscient, est l’ensemble des processus qui, temporairement inconscients, seraient susceptibles de devenir conscients (lorsqu’on recherche un souvenir par exemple...).

L’inconscient est l’ensemble des phénomènes psychiques qui échappe à la conscience. Il représenterait l’ensemble des pensées, des images, des souvenirs ou des émotions qui ont été refoulés de la conscience mais qui continueraient à jouer un rôle dans le processus psychique et qui se manifesteraient, entre autres, dans les rêves, les actes manqués, les symptômes...

Ainsi à partir de cette topique FREUD énonce le notion de refoulement consistant a rejeté dans l’inconscient des idées et des désirs inacceptables pour le conscient.

 

Dans sa seconde topique (1920), FREUD distingue 3 instances : le Ca, le Moi et le Surmoi.

Le Moi est la partie consciente de l’appareil psychique.

C’est cette instance qui entre en relation avec le monde extérieur.

Le Ca est le réservoir de la recherche des plaisirs de l’être humain (pulsions sexuelles, puis nutritives, combatives...).

Le Surmoi va se modeler durant toute l’enfance (en relation avec l’éducation).

Il est l’intégration des expériences permises et défendues comme elles ont été vécues pendant l’enfance.

Le Surmoi serait alors l’instance “morale” du psychisme, dépositaire de tous les interdits (interdits parentaux...) et de l’ensemble des valeurs culturelles et éducatives.

A partir de cette topique, FREUD déclare que le Moi est un pôle défensif, à l’origine des mécanismes de défense. C’est un “médiateur” qui tente de faire la synthèse entre les exigences du Ca et les contraintes du Surmoi, et la réalité extérieure.

Le Moi serait donc un lieu de conflits et de compromis où s’opposeraient des forces contradictoires, le Moi cherchant à résoudre ces conflits dans le meilleur intérêt global du sujet.

 

2°) Les stades (théorie sexuelle du développement de l’enfant)

S. FREUD présente “le développement du sujet” par la théorie des stades libidinaux.

Selon lui, le sujet se constitue progressivement par phases, par étapes de l’évolution libidinale, sous le primat de l’hédonisme et des zones hérogènes.

Le passage successif des stades est marqué par l’acquisition du précédent et par des changements qualitatifs observés dans l’évolution physiologique, psychologique et comportementale de l’enfant.

Le principe pulsionnel qui vise dans l’enfance à l’excitation de zones hérogènes très nombreuses ne diffère pas de celui qui, plus tard, sera lié à la vie génitale...

 

            * le stade oral (0 à 12 mois), la source de la pulsion est la bouche et la cavité buccale, l’objet de pulsion est le sein maternel...

C’est le stade du passage de l’illusion de la fusion à la distinction entre Moi et non-Moi...

Les incidences de ce développement oral sur le développement intérieur du sujet : on peut observer des “restes” de ce stade oral chez la personne par la succion du pouce, le replis, les troubles de la conduite alimentaire, l’alimentation demeurant liée, dans de nombreux cas, à un rapport oral avec la mère... Au niveau pathologique, on peut trouver des difficultés fusionnelles (psychoses, paranoïa, mélancolie...).

            * le stade anal (2ème et 3ème années) commence avec le début de l’acquisition du contrôle sphinctérien (puis urétral). La source pulsionnelle devient la muqueuse anorectale et l’objet de pulsion est représenté par le boudin fécal...

Ce second stade marque le passage de l’illusion de la mêmeté à la distinction des générations...

Les incidences de ce développement anal sur le développement intérieur du sujet : on peut observer des difficultés au niveau de l’estime de soi, de la confiance en soi, un attachement fort à la propreté ou à la saleté, des comportements de collectionneur, d’amassement d’argent et de pouvoir, et à un niveau plus pathologique, des constipations névrotiques.

Ce stade peut aussi marquer, dans certains cas, le phénomène d’encoprésie ou d’énurésie, tous deux en dehors d’un caractère strictement physique, pouvant être, à un niveau psychologique, un symptôme de relations difficiles avec l’entourage, une difficulté à appréhender  la réalité...

            * le stade phallique (de la 3ème à la 4ème année), la source de pulsion se déplace vers les organes génitaux, l’objet de la pulsion est représenté par le pénis.

L’objet introduit progressivement la dimension “d’Angoisse de Castration”...

C’est le passage de l’illusion de la toute-puissance à la distinction des sexes...

Les incidences de ce développement phallique sur le développement intérieur du sujet : on peut observer des difficultés de jalousie pathologique, des comportements exhibitionnistes (liés à l’angoisse de Castration...)...

            * le complexe d’œdipe (5/6 ans), l’objet de pulsion est progressivement le partenaire du couple parentale, la pulsion étant commandée par l’excitation de la possession de ce partenaire.

Cette quatrième étape reprendra de façon “cumulée” la reconnaissance des bénéfices des 3 premiers stades sous le primat de l’interdit incestueux.

            * le renoncement à posséder l’objet libidinal va amener le sujet vers la sublimation et trouver d’autres objets de satisfaction, tels que la socialisation, l’investissement scolaire...

Ce passage amènera l’enfant vers la période de latence (période calme avant la reviviscence du même conflit à l’adolescence...).

            * l’adolescence qui correspond au passage de l’enfance à l’âge adulte avec tout ce que cela comporte de transformations physiologiques, psychologiques, de difficultés à les appréhender avec 3 mouvements importants : la séparation/individuation, l’opposition/différenciation et la déliaison/reliaison...

 

3°) l’approche dite économique marquant la présence continuelle pour chaque sujet des conflits internes, des pulsions, des mécanismes défensifs...

 

 

L’œuvre de S. FREUD, dans ce contexte, sera complété par les apports d’Anna FREUD (concept des lignes de développement, de la dysharmonie...), Mélanie KLEIN (pulsion de vie, pulsion de mort, notion de position schizo-paranoïde...), D. Woods WINNICOTT (objet transitionnel...)...

Dès lors, la théorie de FREUD sera la base de recherches, de retours, voire d’éloignements de tous les auteurs, chercheurs (...) liés au courant psychanalytique...

 

 

 

 

 

 

Le concept de “Mécanismes de défense

 

Sigmund FREUD introduit le terme de “défense” en 1894 dans “Les psychonévroses de défenses”.

Il désigne “la révolte du moi contre des représentations et des affects pénibles ou insupportables”[6].

 

Les défenses s’opposent de manière inconsciente aux conflits intérieurs, aux pulsions (libidinales, agressives, consistant à résoudre une tension génératrice au moyen d’un objet grâce auquel la satisfaction est obtenue, et principe de plaisir, caractérisé par la recherche de réduction ou d’évacuation de tensions psychiques).

 

Le conflit, au niveau psychique est donc une situation créée par l’existence de deux pulsions entrées en compétition chez le même sujet.

La résolution du conflit, dite résolution favorable amène au processus d’adaptation progressive du sujet à la réalité.

Dans le cas contraire, “une résolution défavorable” du conflit inscrit le sujet dans une inadaptation à la réalité.

 

Le conflit interne, même s’il peut être souvent compliqué, s’avère donc indispensable à la maturation de l’identité, à la structuration et au développement harmonieux de l’enfant, du “petit d’homme”.

L’enfant chemine vers l’acceptation des frustrations.

Les moments de crises sont des moments importants pour la construction du sujet se confrontant à la réalité de l’Autre, de son environnement.

 

Anna FREUD présente la défense comme une activité du Moi destinée à protéger le sujet contre une trop grande exigence pulsionnelle, des frustrations trop intenses, des évènements traumatiques, un conflit avec les autres instances psychiques. Il a, pour assurer cette protection à sa disposition les mécanismes de défense, dont le plus connu est le refoulement consistant “à rejeter et à maintenir dans l’inconscient des représentations (pensées, images, souvenirs) liées à une pulsion[7], puis la régression, la formation réactionnelle, l’isolation, l’annulation rétroactive, la projection, l’introjection, la dissociation, le déplacement, la retournement sur soi, la renversement dans le contraire, la sublimation...

 

Mélanie KLEIN en 1959 introduit d’autres mécanismes comme le clivage de l’objet (qu’elle considèrera comme la défense la plus primitive), le contrôle de l’objet, le déni de la réalité et l’identification projective.

 

D. W . WINNICOTT, de son coté, s’intéressera moins à la régression qui ramène à une fixation libidinale du fait d’un succès trop grand ou d’un échec traumatisant du sujet lui-même, mais celle liée à un échec de l’environnement, une régression à la dépendance[8].

 

Jean BERGERET en 1974 décrit vingt trois mécanismes de défense, il ajoute aux mécanismes introduits par Anna FREUD, au déni et à l'identification projective de Mélanie KLEIN, les douze mécanismes suivants : la condensation, le contre investissement, le dédoublement du Moi, le dédoublement des imagos, la dénégation, le déplacement, la formation de compromis, la formation substitutive, la formation du symptôme, l'identification, l'identification à l'agresseur et la forclusion (qui se rapproche du clivage de l'objet de Mélanie KLEIN) terme introduit par Jacques LACAN.

 

Ainsi, on peut dire que les mécanismes de défense sont utilisés par tous les sujets, de manière plus ou moins pathologique, mais tout un chacun passe par cette résolution de conflits.

Un sujet ne serait jamais malade parce qu’il a des défenses. Le sujet “normal” est celui qui possèderait de “bonnes défenses”.

Les “Mécanismes de défense” ont une valeur différente selon les cas, les uns aboutissant à des résolutions pathologiques et les autres entraînant des conséquences plus favorables.

 

 

 

 

Les notions de régression et de fixation

 

La régression est un réel mécanisme de défense qui consiste en “un passage à des modes d’expression et de comportement d’un niveau inférieur du point de la complexité, de la structuration et de la différenciation”[9].

Les tendances régressives se manifestent dans toutes les réalisations importante de l’enfant, dans les fonctions du Moi qui assurent le contrôle, de la motricité, de l’épreuve de la réalité, du langage, dans l’acquisition du contrôle sphinctérien et anorectal, dans les processus de pensée et la maîtrise de l’angoisse, dans les adaptation sociales (tolérance à la

frustration ...), le contrôle des impulsions et le comportement...

La régression constitue donc un retour plus ou moins transitoire à des modes d’expression antérieurs de la pensée, des conduites ou des relations objectales, face à un danger interne ou externe susceptible de provoquer un excès d’angoisse ou de frustration.

Dans le développement de l’enfant, il s’agit le plus souvent de régression temporelle, c’est à dire que l’enfant retourne à des buts de satisfaction pulsionnelle caractéristiques de stades antérieurs”[10].

“On doit tenir pour normaux des retours épisodiques à des comportements plus infantiles”[11]

Les mouvements pathologiques se caractérisent par une régression plus “arrêtée” avec une prédominance de l’exigence du Ca.

 

 

La fixation, c’est un stade où se fixe la libido et qui est caractérisé par la persistance de modes de satisfaction liés à un objet disparu. Elle peut s’observer quand le lien entre la pulsion et l’objet est particulièrement étroit.

La fixation est susceptible de faire obstacle aux nécessaires changements liés au développement.

La fixation surviendrait quand un évènement ou une situation affective a si fortement marqué un stade évolutif que le passage est rendu difficile ou m^me inhibé.

La fixation survient quand des satisfactions excessives ont été éprouvées à un stade donnée ou lorsque les obstacles rencontré dans l’accession au stade suivant provoquent une frustration ou un déplaisir tel que le retour défensif au stade précédent paraît plus immédiatement satisfaisant ou rassurant.

Le concept de régression est étroitement lié à la notion de point de fixation, celui-ci pouvant appelé à une régression.

Même si elle ne semble pas être “intégré” dans la liste des mécanismes de défense du Moi, la fixation serait tout de même et certainement une défense au même titre que la régression.

 

“tandis qu’une partie de l’énergie pulsionnelle va de l’avant, une autre, d’importance variable, reste en arrière, s’accroche à des buts et à des objets précoces et crée ce qu’on appelle des points de fixation - ils peuvent être dus à toute une série d’expériences traumatique, soit par frustrations, soit par gratification excessive, à n’importe quel stade...” explique Anna FREUD, en reprenant une hypothèse de D. W. WINNICOTT sur les effets “négatifs” d’une gratification trop importante apportée par une mère (réelle ou symbolique) qui serait “trop bonne”...

 

 

 

 

“Un cheminement vers la pratique”

 

Après ce cheminement théorique et conceptuel, je vais présenter 3 cas d’enfants rencontrés dans ma pratique professionnelle au sein de mon établissement actuel, me permettant “d’expérimenter” ma compréhension du concept étudié, ainsi qu’une réflexion sommaire sur le concept global de régression auprès d’adultes handicapés vieillissants rencontrés lors d’un stage dans le cadre de ma formation d’éducateur spécialisé.

 

Ces présentations devront m’amener à étayer ma réflexion de départ.

 

*****

L : “J’ai mal à mon manger”

 

L est une petite fille de 8 ans et qui a été admise dans l’établissement cette année.

 

Elle vit chez sa mère, depuis la séparation de ses parents, il y a 2 ans.

 

Elle a été orientée en éducation spécialisée pour des troubles importants du comportement et de la personnalité l’empêchant de poursuivre un cursus scolaire ordinaire, mais aussi l’empêchant de vivre une vie sociale “adaptée”.

 

Ces troubles, se traduisant par de nombreuses crises et une agressivité omniprésente, engendrent des difficultés importantes de socialisation, une intolérance aux contraintes et à la frustration (blocages, cris, refus), une peur du moindre changement, des problèmes conséquents de concentration et d’attention, une autonomie dans les actes de la vie quotidienne très faible...

L témoigne aussi de difficultés importantes au niveau du coucher et de la nuit (agitation, insécurité, anxiété, refus des règles... Recherche des limites...).

Son comportement montre une forte rigidité de fonctionnement et de pensée, une crispation face à la difficulté, une recherche de maîtrise des choses pour se rassurer...

Lors d’énervements ou de moments d’anxiété, elle témoigne d’une forme importante de régression verbale et physique...

 

La frustration semble réellement être vécue comme anéantissant, ce qui se traduit par de nombreuses crises.

 

L témoigne surtout d’une grande souffrance parasitant toutes ses relations...

 

L présente aussi une autre grande difficulté (est-elle liée ou prédominante aux

autres ?) qui se traduit par des troubles alimentaires très importants.

 

Ce comportement s’est installé depuis l’âge de 2 ans et il ne semble pas y avoir eu d’évolution de celui-ci depuis son démarrage.

 

La mère de L a pu évoquer ce problème qui la touche très profondément (affectivité, sentiment de culpabilité, impuissance...), et définir, selon elle, l’époque et les raisons de l’installation de ces conduites.

 

Le père de Madame est décédé quand L avait 2 ans.

Très affectée par cette disparition, Madame est entrée en phase dépressive, délaissant, selon elle, L.

Cette dépression amena Madame à une obligation d’hospitalisation durant 3 semaines pendant lesquelles L a été confiée à ses grands-parents paternels...

 

Cette séparation mère/enfant semble avoir été très trop difficile à vivre par la petite L.

Très rapidement, pendant, puis, après son séjour chez ses grand-parents, L refusa de s’alimenter “normalement”.

A noter que le sevrage du biberon avait été “suffisamment bien” entrepris, et que L commençait à manger de façon diversifiée de la nourriture moulinée.

 

Après ce “séjour/séparation” d’avec sa mère, L n’a plus voulu s’alimenter que par son biberon.

Plusieurs consultations spécialisées n’ont pas changé le comportement de L (et de sa mère).

Jusqu’à son entrée dans l’établissement et même les jours où elle n’y est pas, L veut son biberon chez elle (elle a 8 ans).

La seule nourriture solide qu’elle mangeait, avant son admission, était les pommes-frites, le pain, le fromage, les yaourts.

 

On peut observer plusieurs choses que L mange :

- des comportements spécifiques et presque stéréotypés autour de l’acte de manger; L  suce un bord de sa main avant l’incorporation d’une nourriture, comme pour effectuer une succion (de type succion du pouce, du biberon, du sein, comme pour retrouver “un plaisir connu et archaïque” avant cette difficulté à manger...).

- quand, elle boit, sa déglutition est similaire à celle d’une tétée.

- une difficulté à mâcher, qui la fait attendre de longs moments, la nourrir dans la bouche, sans action...

 

 

 

 

Pourquoi ce trouble symptomatique d’une fixation ?...

 

 

“Si un enfant se montre dans son mode de réaction insatiable - ou s’il développe une crainte d’être empoisonné, un refus de nourriture, il est pour nous évidant que le point de fixation de son développement - se situe au stade oral”[12].

 

L a semble-t-il vécu une angoisse très forte laissant naître des pulsions internes considérables lors de la séparation d’avec sa mère.

“Son placement” chez ses grands-parents, personnes à peine connues à cet âge, n’a peut-être fait qu’amplifier, dans ce contexte précis, cette angoisse, privant L de son objet oral, appelant à une défense par la régression, la fixation peut-être même, à une étape plus connue, plus s’investie, plus sûre qu’est le stade oral dans son développement à peine passé...

 

Je pense que L n’a pu affronter et résoudre ces conflits survenus en plein sevrage, le climat émotionnel a poussé son inconscient à se fixer à son stade de développement.

Ses troubles de l’alimentation, son besoin de lait, de succion, mais aussi l’agressivité combattant certainement l’angoisse de perte d’objet et la positionnant dans une toute-puissance, sont des symptômes m’amenant à poser l’hypothèse d’une fixation orale...

 

La suite du développement de L aura alors pu ensuite se poursuivre avec une affectivité déviée (troubles du caractère, psycho-névrose, comportement asocial) en se montrant incapable de dominer son agressivité contre les autres ou contre elle-même[13].

 

Le retour de sa mère n’a pas pu changer cette accroche rassurante (inconsciente) à ce point oral, d’autant plus qu’elle aura pu vivre cette séparation d’avec sa fille comme très culpabilisante (sans évoquer sa propre gestion d’un éventuel conflit entre la mort - de son père - et la vie...), en accédant “affectivement” aux demandes de L.

L’alternative d’un établissement médico-éducatif pourrait faire tiers entre l’interaction “pathologique”, à ce niveau précis de l’alimentation, entre la mère et L, puisque dans une relation moins empreinte à une histoire affective forte, et dans une pratique éducative basée sur une dynamique individuelle et de groupe.

 

Quoi qu’il en soit : “un trouble excessif de l’alimentation au cours des premières années laissent des traces qui, plus tard, augmentent et compliquent les troubles[14].

 

 

 

***********

 

Y : “Je ne voudrais plus faire pipi, mais je n’arrive pas à parler de mes problèmes...”

 

Y est une fillette de 9 ans.

 

Elle a été orientée dans l’établissement il y a un an, pour un échec scolaire sérieux, plus de 3 années de retard, accompagné de troubles du comportement très importants (agressivité, instabilité, toute-puissance, insécurité, problèmes relationnels, manques d’intérêt...).

 

A son arrivée elle montrait est très peu d’autonomie, de grosses difficultés face à la frustration, aucun repérage spatio-temporel, des problèmes de motricité fine...

 

Au niveau familial, elle est la cadette d’une fratrie de 4 enfants.

Ses parents sont séparés depuis 2 ans, elle vit chez sa maman avec ses 3 frères.

 

Cette petite fille est une énurétique depuis 2 ans.

 

Il s’agit d’une énurésie dite secondaire puisqu’elle a été propre vers 2 ans et demi, et ce problème est apparu vers 7 ans.

Il s’agit d’une énurésie nocturne, mais aussi diurne, qui paraît énormément gêner Y vis-à-vis du regard des autres, mais paradoxalement peu au niveau de son image corporelle qu’elle ne semble pas investir, se présentant souvent très sale...

Y voudrait “ne plus faire pipi”, mais l’aide est difficile, tant elle a du mal à évoquer ses problèmes, tant il me faut mieux comprendre ce symptôme.

 

Comment interpréter, à mon niveau, ce symptôme?

 

A l’écoute des éléments familiaux, on peut relever 3 principaux faits marquants et importants pour émettre une hypothèse et tenter de comprendre cette d’énurésie :

            1°)  La naissance d’un frère à cette période. (peut-être que le sexe, en plus de sa naissance, est important, 2 frères).

            2°) Très peu de temps après cette naissance, la séparation des parents, avec une disparition momentanée du père.

C’est à cette période que les troubles du comportement semblent devenir plus handicapant pour Y et pour son entourage, et où, aussi, l’échec scolaire se déclare...

            3°) Une famille maternelle importante mais semble-t-il très structurée, où Y ne trouve pas sa place.

La maman est volontaire mais très démunie socialement, avec, semble-t-il elle-même, des difficultés psycho-affective dans sa prime enfance...

Les relations mère/fille paraissent inadaptées, sans distinction de génération...

 

D. MARCELLI explique que les facteurs psycho-affectif sont les plus évidents en ce qui concerne l’énurésie secondaire. La survenue ou la disparition de l’énurésie peut correspondre à un épisode marquant de la vie de l’enfant[15].

L’énurésie peut être fonction d’un point de fixation au développement psycho-affectif (phase anale de rétention-expulsion) ou comme le dit M. HOUSER, il pourrait s’agir (chez la fille) d’un conflit centré sur “l’envie de pénis” donc lié au stade phallique[16].

Quoi qu’il en soit, dans cette situation, on peut noter que Y semble se défendre inconsciemment face aux faits marquants qu’évoque D. MARCELLI (l’arrivée d’un frère et la peur de perdre sa place, la séparation de ses parents et la “perte” de son père, l’échec scolaire, cause ou résultante, une relation avec sa mère inadaptée...).

 

L’énurésie semble être, dans ce cas, une régression face à ces nombreux faits vécus comme trop frustrants par Y.

le Moi se défend face aux nombreux conflits imposés par ces évènements en amenant Y à régresser vers un stade antérieur (entre anal et phallique).

L’énurésie est le premier symptôme manifeste lié à l’hypothèse de “régression”, sa relation semble-t-il profonde à la saleté viendrait souligner celle-ci.

Mais Y montre aussi d’autres symptômes laissant sous-entendre la mise en place de “Mécanismes de défense”, telles que l’utilisation conséquente d’une “pensée magique” immature dans son comportement, mais aussi des maladies de peau diverses amenant à penser à une manifestation psychosomatique...

 

Une autre hypothèse m’amène à penser, au regard d’une relation sans distinction de génération entre Y et sa mère, que Y pourrait chercher à dominer inconsciemment sa mère et à la tourmenter par son énurésie (dans une défense face à sa peur de perte de place).

Mais cette énurésie pourrait aussi être un mouvement inconscient visant à rassembler ses parents séparés...

 

La difficulté au niveau éducatif est d’amener Y a pouvoir exprimer, extérioriser ses difficultés (ses conflits), afin de l’aider à les surmonter, à mieux vivre avec, sans pour autant évoquer ces “Mécanismes de défense”...

 

Y ne semble pas encore pouvoir accéder à cette démarche, en toute quiétude, les “mots pour les maux”...

 

Jean BERGERET rappelle que les défenses apparaissent quand il existe un conflit aigu entre les différentes instances de la personnalité psychique ou entre certaines instances et la réalité[17].

Y semble profondément témoigné d’un de ces conflits entre son Moi et une réalité trop exigeante pour elle. Le fait qu’elle ne puisse l’évoquer démontre certainement l’aspect inconscient, mais aussi peut-être la lourdeur des difficultés qu’elle vit.

 

 

Pour clore cette suite de cas, je souhaiterais évoquer une dernière situation concernant S, qui n’est plus dans l’établissement aujourd’hui, mais pour qui la souffrance de cet enfant que différents symptômes venaient faire pointer m’avait profondément touché et interpellé, et pour qui, je pense le concept de régression me parait être une hypothèse très parlante.

 

S : S se défend contre...

 

S était, à l’époque évoquée, un petit garçon de 9 ans, très en difficulté, vivant des états de crises intenses et très fréquents, des rejets de la part de son entourage, une marginalisation de part une encoprésie constante.

Il était un enfant-symptôme, un enfant victime. Victime de ses difficultés, de sa différence, de “mauvaises conditions éducatives, économiques, affectives”...

Il était un “écorché vif”, enfant carencé et abandonnique, à la recherche d’une mère “suffisamment bonne”, d’un père présent et identificatoire, en quête de sa propre vie...

C’était un enfant à 2 cotés (et pleins d’autres !...), on pouvait se heurter à d’innombrables refus face à notre demande, avec des crises impressionnantes, mais aussi se retrouver face à une demande affective très forte, une relation privilégié incommensurable..

 

S était un petit garçon à l’air vif,  dans un état vestimentaire et physique toujours négligé, pas investit, qui avait été admis dans l’établissement pour de nombreuses raisons de comportements déviants, et d’incapacité scolaire...

Il était suivi par un service social, après avoir séjourné plusieurs mois en maison d’enfants pour des carences éducatives importantes.

Sa mère semblait en grande difficulté éducative mais aussi affective.

Le père était “éducativement et affectivement” absent...

 

S déclara “son encoprésie” vers 7 ans.

Etait-elle liée au placement en maison d’enfants, à la prise de conscience de ses carences affectives à l’âge du conflit oedipien[18], à l’absence d’un père à qui il voulait ressembler, à d’autres raisons ?...

 

Néanmoins, mon hypothèse se porte en priorité sur les carences affectives ayant pour conséquence une régression à un niveau émotionnel et sphinctérien, réalisent une régression du Moi en formation.

La quantité de déplaisir ou d’angoisse qui peut résulter de l’affrontement d’un enfant avec des situations très pénibles, peut excéder ce qu’il peut supporter sans aide. Aussi, il pourra se garder contre cela par les “mécanismes de défense” (et éventuellement la “régression”) qui entreront en action pour protéger son Moi (Anna FREUD).

 

S semblait vivre à travers les autres, ne s’appartenant pas, malgré les rejets.

Il était beaucoup sur le versant de “l’Agir” au travers de nombreux passages à l’acte, comme dans un fuite de ses difficultés trop lourdes à porter, à parler...

Les problèmes relationnels de S, surtout avec sa mère, l’emmenaient certainement à une régression anale avec pour premier symptôme l’encoprésie.

 

S éliminait ses excréments dans sa culotte jusqu’à 10 fois par jour, il cachait parfois ses vêtements souillés (comme une façon de retenir encore ses selles vis a vis de l’adulte).

de plus, l’hypothèse de “régression anale” pourrait venir se confirmer par sa tendance à l’accumulation, “la collection”, le besoin de s’entourer d’objets que s ramenait tous les jours dans le groupe, objets de tout genre, retrouvés dans les poubelles de son quartier...

 

L’encoprésie est un symptôme de relations difficiles avec l’entourage avec son monde.

C’est aussi un mécanisme de défense par le biais de la régression pour surmonter les traumatismes que la vie apporte...

Ce symptôme, c’était une alarme inconsciente de S pour de parler de sa souffrance.

 

Enfin, D. MARCELLI explique qu’au niveau de l’investigation psychanalytique, on retrouve chez l’enfant encoprésique une importante fixation anale, l’enfant semblant vouloir établir un rapport privilégié à la mère, l’objet d’échange étant le boudin fécale, surtout quand le père est inaccessible[19].

L’encoprésie qui persiste sur plusieurs années est de forme grave dans un environnement familial pathologique (carence socio éducative, absence du père).

 

 

*****

 

 

Pour ces 3 cas présentés, il me parait important d’émettre une idée supplémentaire concernant le vécu, pour chacun des enfants, du passage, sans doute pas résolu, du “complexe d’œdipe”.

Moment où, quand l’enfant l’atteint, est générateur d’un conflit très important et profond, qui peut se révéler très difficile au niveau psychique et déclarer des “Mécanismes de défense” tels que la “régression”...

Pour chacun de ces cas, on note l’absence d’un père (dans une situation familiale souvent compliquée), personnage central de ce stade, et une difficulté pour chacun d’eux à accéder à une socialisation adaptée et à l’investissement des processus intellectuels et d’apprentissage...

 

 

*****

 

 

Pour finir, durant une intervention en foyer d’hébergement pour personnes handicapées mentales adultes vieillissantes, j’ai été amené à rencontrer de nombreux résidents dits régressés.

Mais régressés comment, pourquoi, vers où ? Régressés physiquement, avec une perte progressive, dégénérescente ou soudaine de la maîtrise de leur corps ? Régressés par une démarche inconsciente de gestion d’un ou de conflits internes avec un retour à des expériences connues ?

3 personnes avaient, dans leur anamnèse médicale, “connu” une régression pendant l’enfance (régression autistique ou psychotique) liés certainement à la défense à une pathologie plus lourde, mais laissant penser à une régression pathologique bloquant conjointement aux autres pathologies le développement “harmonieux” de ces personnes...

 

La régression, dans ce contexte de personnes vieillissantes, handicapées mentales, me semble plus difficile à cerner.

 

Jean BERGERET explique d’ailleurs que “la régression est beaucoup plus facile à mettre en évidence chez l’enfant que chez l’adulte (ou interviennent de multiples remaniements défensifs)...”[20], sans parler de la spécificité des handicaps et des maladies mentales dans le développement des sujets...

 

Ce concept montre, à travers cet exemple, sa complexité, la rigueur de sa théorie...

 

De plus, il me semble que la régression, comme mécanisme de défense, s’évoque dans le registre de la névrose.

La régression psychotique ou autistique ne parleraient-elles pas aussi d’une autre organisation ?

 

 

 

 

Conclusion

 

Par sa découverte de l’inconscient, FREUD put affirmé que le Moi-conscient n’était pas maître dans sa propre maison.

Chaque sujet est mut, non pas par des mobiles qu’il croit consciemment, mais par d’autres mobiles qu’il ignore, refoulés, rejetés dans son inconscient, et qui peuvent apparaître, réapparaître, sous forme d’actes manqués, de lapsus, de trous de mémoire, de symptômes...

Dans ce contexte, tout comportement a un sens, le hasard n’existe pas, comme avait pu le dire Françoise DOLTO en 1984 : “Tout est langage”.

 

 

Cette seule idée, à la base même de la pensée psychanalytique, peut permettre, par un premier mouvement qui se devra d’être étayé pour comprendre, à celui ou celle qui est amené à rencontrer, à s’occuper de personnes en difficultés, qu’il existe en tout un chacun une complexité psychique qui dépasse le seul fait observé, le seul trait de caractère déroutant, parfois même apeurant, le seul acte anormal, à condamner...

 

 

C’est dans ce contexte que le concept de “Mécanismes de défense”, processus psychique inconscient ayant pour but de réduire les tensions internes survenues chez une personne et de la protéger contre l’émergence trop importante de l’angoisse, appelle à une sensibilisation de tout éducateur à ce phénomène (qu’il peut lui aussi développer dans certaines situations), au même titre que le phénomène de transfert dans la relation éducative par exemple, afin d’appréhender plus justement et surtout plus respectueusement la personne dont il a la charge d’accompagner...

Cette position de ma part s’applique évidement au concept de “régression” dont j’ai pu observer, de ma place d’éducateur au quotidien auprès d’enfants présentant des troubles du comportement, du caractère et de la personnalité, de nombreux symptômes sans raisons rationnelles au premier regard...

Après s’être approché “plus sensiblement” du concept de “régression”, il peut devenir plus facile, dans ce contexte, “de comprendre pourquoi il peut exister tant d’écarts dans le développement d’un enfant par rapport à un autre enfant hypothétiquement normal” (Anna FREUD)

 

 

 

Aurais-je pu répondre à mon questionnement sur les effets bénéfiques ou négatifs de la régression auprès des enfants que j’accompagne un temps dans leur développement?

En fait, tout dépendra du type de régression et de point de fixation.

La régression pourra s’avérer, dans certains cas, bénéfique si elle aura permis à l’enfant “d’étouffer” sur une période donnée, ses tensions en trouvant le temps nécessaire, un point reconnu et rassurant de son développement (coté adaptatif de la fonction de la régression).

La régression peut ainsi servir l’adaptation et la défense, aidant à maintenir un état “normal”.

Elle pourra en revanche devenir néfaste, voire parfois pathologique, si elle est inefficace, rigide, inadaptée aux réalités internes et externes de l’enfant, l’amenant à une dysharmonie de développement.

Elle devient aussi un facteur pathogène, dans des cas de grandes détresses traumatiques, de grandes angoisses qui l’amène à devenir permanente...

Néanmoins, il nous faut tenir pour “légitime que les enfants, à certains moments, retournent en arrière, perdant certains contrôles après qu’ils les ont acquis...” (Anna FREUD)

 

 

La reconnaissance, dans le quotidien, de symptômes pouvant amener à l’hypothèse de régression ne pourra, en tous les cas, n’être que favorable à un positionnement, une empathie, des pistes de travail et d’accompagnement spécifiques, en lien avec une équipe pluridisciplinaire...

Cette note de recherche spécifique m’aura permis d’opérer, à ce moment précis de mon processus de formation, un réel travail de lien entre les apports théoriques issus de la formation, alimentés, étayés par des lectures complémentaires, et ma pratique d’éducateur, dans un cheminement différent de mes habitudes de fonctionnement, mouvement partant de la théorie vers la pratique...

Ce travail  m’aura conduit à “visiter” de façon certainement plus aiguë le concept choisi, que par une démarche contraire...

 

Après cet écrit à “l’éclairage analytique”, dans un contexte précis d’étude, je souhaite rappeler, me rappeler, que le travail éducatif , par l’hétérogénéité des personnes, des vécus, des relations, des situations, des problématiques (...) ne peut réduire ses références théoriques et de pensées à des modèles dominants.

La pratique éducative appellerait au contraire à opter pour une approche multiréférentielle couvrant la réalité sociale et la réalité psychique de chaque personne accompagnée.

L’éducateur devra alors repérer les conditions de l’utilisation de chacune des références théoriques, sur quel “champ de savoir” il pourra s’appuyer pour penser son acte, pour comprendre l’Autre, avec l’idée que la pratique éducative est une démarche de problématisation plus qu’une recherche de résolution de problèmes.

 

Pour finir, le travail éducatif c’est aussi la réalité, la prise en compte que “la complexité du vivant suppose l’imprévisible de l’advenir et la prise en compte de processus non totalement maîtrisables” (Jacques MARPEAU).

 

 

 

Références pour développer ce travail

 

- Conférences de  F. RONZON - RP 2003  - “Le développement du sujet”

 

- Conférences de L. BLAHAY - RP 2003 - “Les mécanismes de défenses”

 

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Bibliographie

 

 

* “Le Moi et les mécanismes de défense”

- Anna FREUD - PUF 1949

 

 

* “Le normal et le pathologique chez l’enfant”

            - Anna FREUD - Éditions Gallimard 1968

 

 

* “Abrégé de psychologie pathologique”

            - Par Jean BERGERET - Masson paris 1972

 

 

* “Psychopathologie de l’enfant” 

            - D. MARCELLI - Masson - 1993 Paris

 

 

* “2 à 6 ans, Vie affective et problèmes familiaux “

- Myriam DAVID - Dunod Paris 1997

 

 

* “Vocabulaire psychologique et psychiatrique”

- PUF -1993 Paris

 

 

* Dictionnaire fondamental de la psychologie

- Larousse/VUEF Paris 2002

 

 

 

 



[1]  Article de Jacques TREMINTIN - Lien social n° 592 sur l’ouvrage “L’éducateur spécialisé en questions(s)” de Jean BRICHAUX - Erès 2001.

[2]   “L’éducateur spécialisé en questions(s)” - Jean BRICHAUX - Erès 2001.

[3]  Sigmund FREUD. Préface de "Jeunesse à l'abandon" d'August AICHHORN - 1925 - Éditions Privat 1973.

[4]  “Les travailleurs sociaux” - Amédée THEVENET et jacques DESIGNAUX - PUF - 1985 Paris

[5]  “Les travailleurs sociaux” - Amédée THEVENET et jacques DESIGNAUX - PUF - 1985 Paris

[6]  “Le Moi et les mécanismes de défense” - Anna FREUD - PUF 1949

[7]  “Vocabulaire psychologique et psychiatrique” - PUF -1993 Paris

[8]  “Donald Woods Winnicott” - denys Ribas - PUF -paris 2000

[9]  “Vocabulaire psychologique et psychiatrique” - PUF -1993 Paris

[10]  “Psychopathologie de l’enfant” D. MARCELLI - Masson - 1993 Paris

[11]  “Le normal et le pathologique chez l’enfant” - Anna FREUD - Éditions Gallimard 1968

[12]  “Le normal et le pathologique chez l’enfant” - Anna FREUD - Éditions Gallimard 1968

[13]  “2 à 6 ans, Vie affective et problèmes familiaux “ - Myriam DAVID - Dunod Paris 1997

[14]  “Le normal et le pathologique chez l’enfant” - Anna FREUD - Éditions Gallimard 1968

[15]  “Psychopathologie de l’enfant” - D. MARCELLI - Masson Paris 1993

[16]  “Abrégé de psychologie pathologique” - Par Jean BERGERET - Masson paris 1972

[17]  “Abrégé de psychologie pathologique” - Par Jean BERGERET - Masson paris 1972

[18]  “A mesure que le Moi de l’enfant se développe et améliore son mode d’activité, une conscience plus aigue de la différence entre le monde intérieur et le monde extérieur donne à ce Moi l’occasion d’affronter de nombreuses situations déplaisantes et pénibles” / “Le normal et le pathologique chez l’enfant” - Anna FREUD - Éditions Gallimard 1968

[19]  “Psychopathologie de l’enfant” D. MARCELLI - Masson - 1993 Paris

[20]  “Abrégé de psychologie pathologique” - Par Jean BERGERET - Masson paris 1972

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